Le vélo et la mode : La casquette du cycliste

Le sport qui me faisait rêver quand j’étais petit, c’était le cyclisme. Les longs après-midi devant le tour de France ont le tendre goût des vacances d’été de ma jeunesse. Un champs de tournesols, une vieille église, une voiture Skoda, et j’entends résonner la voix de Jean Paul Ollivier, Christian Prudhomme, Thierry Adam et tous les autres dans ma tête. Et parmis ces madeleines de Proust qui ont le pouvoir de me transporter dans mes jeunes années, il y a aussi cet étrange objet qu’est la casquette du cycliste

Je suis venu au cyclisme durant les années Armstrong. Une période que l’on peut affubler de nombreux qualificatifs… Certes. Mais c’est surtout une période où le casque deviendrait bientôt obligatoire. Mes premiers souvenirs de vélo à la télévision me laissent nostalgique, car les coureurs roulaient cheveux aux vents. Ou plutôt visières aux vents…

En effet la casquette était un accessoire très répandu sur les têtes des coureurs. Mais la forme de leurs casquettes m’étonnait au début. Elle ne ressemblait pas à ma casquette de Bugs Bunny faisant tourner un ballon de basket sur son doigt au côté de l’inscription “Georgia Tech”, que mon père m’avait ramenée des Etats-Unis. La visière courte des casquettes cyclistes ne pouvait pas s’arrondir comme je le faisais avec la mienne. J’en étais un peu frustré, un peu jaloux. Mais je trouvais cet accessoire étonnamment classe. Désuet peut-être, mais chic. Je l’associais aux grands exploits de ce sport. J’en voulais une moi aussi. Mais où et comment ?

Aller voir le Tour de France pour de vrai, est une expérience fondatrice dans la vie d’un enfant. On se souvient tous de la caravane qui distribue tous ces cadeaux. On se souvient souvent un peu moins de la course. Au delà des bobs, saucissons cochonou, et autres gadgets que l’on pouvait glaner, il y avait surtout LA casquette “Champion” (Carrefour par la suite) blanche à pois rouge. Le Graal…

C’est donc sur le bord des routes d’une étape dont je ne saurais me souvenir de qui en fut le vainqueur, que j’acquis ma première casquette de cyclisme. La casquette du meilleur grimpeur. Désormais, quand je ferais le tour de mon pâté de maison sur mon petit vélo bleu pendant des heures, j’arborerais fièrement ma casquette. 

Grâce à elle, les voix des présentateurs télé sonnaient dans ma tête et accompagnaient mes coups de pédales. Je me prenais pour Richard Virenque, Laurent Jalabert. Mes exploits rendaient les commentateurs hystériques. 

Grâce à elle, je me rêvais en grand coureur partant pour une chevauchée fantastique dans les Alpes. Cols après cols, je glanais les points du meilleur grimpeur et levais le bras droit, index en l’air en signe de victoire… Comme Virenque. 

Grâce à elle, j’allais plus vite. Tout comme les chaussures ont ce pouvoir de courir vite selon les enfants. Et paroxysme de la vitesse… l’épiphanie du contre-la-montre à l’Alpe d’Huez en 2004. Lance Armstrong s’élançait avec sa casquette…  à l’envers s’il vous plaît. J’étais subjugué. Je n’y avais encore jamais pensé. Dès lors, retourner ma casquette, c’était comme un champignon turbo dans Mario Kart. Un coup de boost. 

J’étais fan de l’accessoire. Et depuis que j’ai commencé le cyclisme, je n’ai cessé d’acquérir les casquettes de vélo les plus originales. Glissées sous le casque, on les remarque moins. Alors elles se doivent d’être clinquantes. Colorées. Décalées. Lorsque je suis sur mon vélo, il faut qu’on me remarque. La casquette de vélo apporte cette petite touche de personnalité qui ajoute un certain style. C’est un petit détail qui fait toute la différence. Et voir un passager de voiture se retourner pour m’observer avec un sourire est source de grand plaisir. 

Malheureusement, les professionnels délaissent l’accessoire aujourd’hui. Sur les courses, les casquettes sont arborées seulement les jours de pluie ou de froid. Quête du gain marginal, chasse aux grammes futiles et optimisation du coefficient de pénétration dans l’air sont probablement les causes de ce délaissement. Même sur les podiums des courses les casquettes traditionnelles ont remplacé les casquettes de cyclisme. Heureusement, certains défenseurs de la casquette cycliste persistent dans les pelotons. 

Toutefois, malgré cette petite collection de casquettes plutôt décalées, j’éprouve une grande déception. Cet accessoire que je trouve très élégant tant pour son côté vintage que distingué n’est guère apprécié en dehors des usagers de la bicyclette. Je me souviens avoir reçu maintes moqueries en m’affichant fièrement avec l’une de ces casquettes devant des amis, en dehors du vélo. Il semblerait que la beauté de cet objet ne touche pas beaucoup au delà de cette communauté. 

C’est bien dommage. J’aimerais bien aller faire mes courses avec ma casquette Mapei sans recevoir des regards interrogateurs et surpris. Peut-être cela arrivera t-il un jour. N’oublions pas qu’il fut un temps où Spike Lee portait fièrement une casquette de cyclisme Brooklyn. Summum de la classe… 

Aujourd’hui, certains traileurs utilisent ce genre de casquette. Les fans de Fixie se l’approprient avec énormément de style. Dans l’ultra cyclisme, elle fait même parfois office de dossard. Y aurait-il un renouveau ? Je l’espère. Je l’attends. De tout coeur. Et il faudrait donc espérer que cela s’étende à de plus larges horizons…

Allez, j’en fais le pari ! Celui de voir un jour Neymar arriver au Parc des Princes avec sa casquette de cyclisme dont la visière afficherait “100% Jesus”*. Lebron James avec une casquette (XXL?) numéro 23… Ou pourquoi pas un clip de Booba, avec une casquette “92 IZI”.

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*Référence à son bandeau lors des Jeux Olympiques de Rio en 2016: https://images.app.goo.gl/evEB5i7iyf1LbeLK9

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