Isabelle Autissier, une aventurière hors-pair

C’est vrai, j’ai un tropisme naturel pour la montagne. Probablement dû au fait que je suis originaire de Haute Savoie et que j’ai toujours habité des régions montagneuses.

Alors pourquoi suis-je autant admiratif devant les exploits des marins ? Peut-être sont-ce les pentes, qui font rouler mon attention vers le bas des vallées, puis portées par les rivières et les fleuves, elle se porte sur les mers et les océans… Et l’inconnu que constitue pour moi la navigation en mer attise cette admiration. Et alimente une rêverie très riche.

Un personnage

J’ai une profonde admiration pour Isabelle Autissier. D’abord pour son parcours de navigatrice. Elle a réalisé des exploits profondément incroyables. Elle a sillonné toutes les mers et océans du globe. Elle a participé à de nombreuses courses, dont un Vendée Globe. Elle est présidente du WWF France. Et c’est aussi une écrivaine que j’adore. Son livre Oublier Klara paru en 2019 m’a totalement bouleversé. Un roman dont l’histoire est parfois très rude mais très poétique à d’autres moments. Le tout baigné dans un univers sauvage.

Soudain, seuls m’a également beaucoup plu. Une sorte de robinsonnade en couple dans une époque où les médias sont rois. Isabelle Autissier possède une plume remarquable. Elle a une capacité à décrire l’atmosphère, l’ambiance, qui fait que l’on s’imagine réellement au coeur de l’action. C’est pourquoi ses récits sont si forts et si poignants. 

France Culture lui a consacré une série de cinq émissions A voix nue, dans laquelle elle se raconte en longueur. Elle revient sur son enfance, sa carrière, son rapport à la mer. Ces enregistrements sont très beaux, et valent le détour. On en apprend beaucoup sur son parcours. Sa manière d’appréhender la vie, la mer. Elle possède une forte philosophie de vie. Ce qui est peut être indispensable pour pouvoir affronter la solitude et le danger de mort en pleine mer. 

De ces entretiens très riches, je retiens plusieurs choses:

D’abord, sa façon de percevoir ses grands objectifs de vie. Elle dit à plusieurs reprise qu’il faut avoir une étoile à viser. Puis, qu’il faut avancer pas à pas. Faire son chemin petit à petit. Et progressivement la marche s’orientera vers l’objectif. Toujours s’efforcer d’avancer, les efforts paieront. 

Sa volonté est également marquante. Elle raconte qu’elle a dû affronter des milieux où les femmes étaient peu présentes et peu valorisées. Elle s’est toujours battue et s’est faite une place. 

J’ai aussi beaucoup aimé lorsqu’elle raconte avoir construit son propre bateau, les soirs après le travail. Pour un non initié c’est à peine croyable de construire un bateau, et de traverser l’Atlantique comme elle l’a fait. Mais elle avait peu de moyens, et une volonté de fer. Avoir peu de moyens n’est donc pas une fatalité. La volonté prime

J’ai beaucoup aimé lorsqu’elle parle de sa relation à la mer. Elle dit clairement que c’est sa maison. Être sur un bateau et naviguer, est sa nature finalement. C’est là qu’elle se sent à l’aise. Et en sachant comme ce milieu peut être hostile, c’est une parole qui est très forte.

Une anecdote qu’elle raconte montre cette force mentale qu’elle possède. Elle dit qu’au milieu de l’Océan Pacifique, les personnes les plus proches ne sont pas sur terre. Mais bel et bien dans l’espace dans la station spatiale internationale. C’est à dire que s’il arrive un problème, il faudra de nombreuses heures pour être secouru. Malgré les outils technologiques modernes de balises GPS, de communication… la solitude reste extrêmement forte. Il faut pouvoir l’assumer. Et vivre avec. C’est pourquoi, le retour à la terre n’est pas simple non plus après un tour du monde en solitaire confie t-elle. 

L’engagement

Son engagement pour l’environnement est aussi notable. Elle possède des convictions fortes, et bien sûr elle a été témoin des ravages des activités humaines sur les océans, la banquise, les poissons… Elle n’hésite pas à faire bénéficier à cette lutte de sa notoriété. Le capital sympathie dont elle dispose est un outil fort pour avoir une influence dans les débats, et cela bénéficie grandement à la fondation WWF France

Les tempêtes

Dans le troisième épisode de la série, elle parle des tempêtes qu’elle a subies. Notamment l’une durant un Vendée Globe, particulièrement puissante. Elle raconte avoir chaviré six fois de suite. Elle a dû se sangler sous une table. Quelle force de caractère faut-il pour affronter cela. C’est véritablement la mort qu’elle a combattu à ce moment là. D’ailleurs les jours suivants, elle s’est mise à rechercher un concurrent, Gerry Roufs, qui disparut en mer lors de cette tempête. 

Une solidarité

C’est l’une des choses touchante dans ce sport. La solidarité entre les concurrents. Il existe peu de sports dans lesquels, pendant une compétition, un concurrent s’arrête aider (et sauver) un adversaire. Cette solidarité, cet humanisme dans la compétition est noble. Qu’importe la course finalement.

Je me souviens d’une course cycliste dans laquelle le leader d’une équipe s’était fait aider par un concurrent d’une autre équipe lors d’une crevaison. Ils avaient tous d’eux écopés d’une pénalité… Pas de solidarité ici… 

Isabelle Autissier elle même a été secourue par un concurrent Italien lors d’une course après avoir passé plusieurs jours dans son bateau retourné.

Les marins sont des grands aventuriers au long cours. Capables d’endurer des conditions de solitude extrême. Ainsi que des conditions de vie extrême. Dans la même lignée que les alpinistes ou aventuriers polaires. D’ailleurs, ceux qui parviennent à conjuguer les deux sont encore plus fascinants. 

Qui du mal de mer ou du mal des montagnes est le plus fort ?

Est-ce que vaincre l’un immunise contre l’autre ? Probablement pas. 

Mais passer de l’un à l’autre ne semble pas si rare. Signe que la force mentale que requiert l’un peut s’appliquer à l’autre. Comment se développe une telle force ?

A noter par exemple la carrière remarquable d’Aurélien Ducroz, champion du monde de Ski Freeride, et qui est passé à la compétition à la voile. Il a notamment pris part à des Transat Jacques Vabre, ou des Tours de France à la Voile. Voilà un bel exemple de pied marin-montagnard…

Peut-être que le Dahu s’adapterait bien à la mer finalement…

Le lien vers la série d’interview sur France Culture: https://www.franceculture.fr/emissions/series/isabelle-autissier

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